La chimie et la musique ont-elles quelque chose en commun? Si l’on est tenté de répondre «non» de prime abord, le parcours de Beat Gysin dément pourtant cet a priori. Né au sein d’une famille de musiciens, Beat Gysin décide d’étudier la chimie en plus de la composition et de la théorie musicale. L’approche scientifique et l’évaluation empirique d’une approche expérimentale sont pour lui tout aussi importantes que l’élément musical. «Mon but en tant que musicien n’a jamais été de devenir célèbre mais de trouver des réponses avec et dans la musique», explique le Bâlois de 50 ans.
La liste de ses œuvres est impressionnante. Mais plus époustouflante encore est la manière dont il présente ses compositions au public. Beat Gysin se tient invariablement à distance de la reproduction et du son en boîte. Le lieu, le temps et surtout l’espace sont des éléments incontournables de ses performances. À cet égard, Beat Gysin n’est pas «que» compositeur et musicien, et l’on se doit de convoquer des termes comme «chercheur», «architecte», «passeur» et «philosophe» pour appréhender son univers.
«Mon approche est philosophique, en effet, acquiesce-t-il. Je m’intéresse à la perception, et je constate que la musique, dans toute sa réception, est privée de sa dimension spatiale.» Selon Beat Gysin, on sépare aujourd’hui totalement la musique de son exécution. L’artiste attire ainsi l’attention sur un point central de son travail: l’interaction systématique entre l’espace et le son. «Sortir mes morceaux de leur espace reviendrait à transformer une œuvre orchestrale en partition de piano. On reconnaîtrait les notes, certes, mais on n’entendrait pas l’orchestre.»
Avec une rigueur, une méticulosité et une soif d’expérimentation remarquables, Beat Gysin ne cesse à travers ses nombreux projets d’explorer l’interaction complexe entre l’espace, le son et la perception de la musique qui en découle. Le lieu du concert devient une partie intégrante de l’œuvre d’art. Celle-ci offre ainsi au public une expérience sensorielle totalement inédite par laquelle le musicien communique à chaque fois de nouvelles idées, qui donneront à leur tour naissance à de nouvelles approches et de nouveaux projets. «Je veux explorer. Et inventer», explique le compositeur, un tant soit peu laconique. Il n’est d’ailleurs pas obligatoirement au centre de l’attention. Il ne joue souvent qu’un rôle de directeur conceptuel. Pour favoriser les échanges, il a fondé le studio-klangraum ainsi que le festival ZeitRäume à Bâle.
«Sortir mes morceaux de leur espace reviendrait à transformer une œuvre orchestrale en partition de piano. On reconnaîtrait les notes, certes, mais on n’entendrait pas l’orchestre.»
Que ce soit dans des églises dotées chacune de propriétés acoustiques propres, dans des usines hydrauliques vides avec un écho pouvant durer jusqu’à 30 secondes ou encore dans des mines désaffectées où règne un silence presque parfait, Beat Gysin déniche toujours de nouveaux espaces à cartographier au moyen du son. Et lorsque l’espace naturel ne suffit pas, le musicien le construit. Son œuvre en six parties, la «Leichtbautenreihe», est l’une des œuvres centrales de Beat Gysin non seulement en raison du travail qu’elle représente, mais aussi parce qu’elle est une suite logique de celui-ci, le musicien y créant des espaces transportables. Il s’agit de six concepts spatiaux abstraits prenant la forme d’architectures pavillonnaires qui offrent des conditions d’écoute inhabituelles et permettent donc une perception inédite de la musique. «Chronos» était constituée d’une scène tournante ressemblant à un carrousel. Pour «Gitter», les musiciens étaient disposés de manière «sphérique» autour du public. Dans «Haus», les auditeurs se promenaient dans des maisons à la découverte d’espaces sonores. Et dans «Rohre», qui sera présentée prochainement (la première aura lieu en septembre 2019 dans le cadre du festival ZeitRäume, dans la cour intérieure du Kunstmuseum de Bâle), le public et les musiciens se rencontreront, au sens propre du terme, dans des tuyaux géants.
«Pour les deux dernières parties, prévues à compter de 2023, j’ai l’intention de me servir de dispositifs mobiles et d’explorer leur impact sur l’écoute. Dans l’un des deux projets, les musiciens et le public seront assis sur de petits chariots constamment en mouvement et redéfiniront ainsi l’espace en permanence. Et dans le dernier volet, il y aura un espace suspendu qui, comme un ballon, implosera régulièrement et se regonflera», précise Beat Gysin. Des projets aussi ambitieux ne sont pas faciles à financer pour un artiste. «Le besoin se fait sentir dès l’étape de la conception, car celle-ci est coûteuse», reconnaît Beat Gysin, qui ajoute: «La contribution Get Going! de la FONDATION SUISA constitue une réponse idéale à ce problème, car elle finance pour ainsi dire des pré-projets. Ce type d’aide n’existait pas jusqu’ici sous cette forme.»
À l’ère de la «festivalisation de la culture», où les experts en marketing accordent plus d’importance à la forme qu’au contenu, la «Leichtbautenreihe» incarne aussi une forme de résistance artistique. «L’avantage est qu’en tant qu’artiste, je conçois l’événement dans sa globalité», explique Beat Gysin, avant d’ajouter: «Dans ce monde de sollicitations tous azimuts, tout musicien se doit aujourd’hui de veiller à ancrer la musique dans l’espace, car elle ne peut plus être comprise hors de son contexte.»
C’est en 2018 que la FONDATION SUISA a commencé à allouer de nouvelles contributions à la création. Dans le cadre de «Get Going!», elle finance des processus créatifs et artistiques qui se situent hors des catégories usuelles. Nous consacrons une série de portraits aux bénéficiaires de ces contributions Get Going!.
In viaggio con e nello spazio
Luogo, tempo e spazio giocano un ruolo centrale nelle opere del compositore Beat Gysin. Nella sua «Leichtbautenreihe» («Serie di costruzioni leggere») in sei parti, l’artista concepisce appositi spazi che permettano al pubblico di confrontarsi con esperienze sonore e spaziali mutevoli. A partire dal 2021 verrà realizzata la seconda parte dell’ambizioso progetto. La FONDATION SUISA sostiene questa opera con il contributo finanziario «Get Going!». Contributo ospite di Rudolf Amstutz
Chimica e musica: come possono coesistere? Quella che inizialmente pare una contraddizione, acquista un senso compiuto all’interno della biografia di Beat Gysin. Cresciuto in una famiglia di musicisti, Gysin ha deciso di studiare, oltre a composizione e teoria musicale, anche chimica. L’approccio scientifico e l’analisi empirica, tipici del metodo sperimentale, sono per lui tanto essenziali quanto l’elemento artistico. «Non ho mai desiderato diventare famoso con la mia musica, quanto piuttosto trovare risposte con e nella musica», chiarisce l’artista di Basilea, oggi cinquantenne.
L’elenco delle sue opere è impressionante. Ancora più straordinaria, tuttavia, è la modalità di esecuzione delle sue composizioni. Gysin si muove costantemente al di là delle riproduzioni e delle registrazioni audio. Il luogo, il tempo e soprattutto lo spazio costituiscono elementi imprescindibili della sua pratica esecutiva. In quest’ottica, Gysin è ben lontano dall’essere «solo» un compositore e un musicista. Sarebbe invece opportuno ricorrere a termini quali ricercatore, architetto, mediatore e filosofo per comprendere appieno il suo universo.
«La mia anima è effettivamente quella di un filosofo», dichiara l’artista a tal proposito. «È questione di percezione: mi rendo conto che la musica, in tutte le sue modalità di ricezione, ha preso le distanze dallo spazio». Oggi si considera la musica come scissa dalla sua esecuzione, aggiunge l’artista, rimandando così a un punto centrale del suo lavoro: l’interazione costante tra spazio e suono. «Isolare uno dei miei brani dallo spazio sarebbe come realizzare una partitura per pianoforte di un’opera orchestrale: si riconoscerebbero le note, ma non si sentirebbe l’orchestra».
Con incredibile costanza, meticolosità e voglia di sperimentare, nei suoi innumerevoli progetti Gysin continua a sondare senza tregua la complessa interazione tra lo spazio, il suono e la conseguente percezione della musica. Lo spazio di esecuzione diventa parte integrante di un’opera d’arte che non solo offre al pubblico un’esperienza sensoriale del tutto originale, ma fornisce continuamente spunti a Gysin per lo studio di nuovi approcci e la creazione di ulteriori progetti. «Voglio scoprire cose. E inventare», così Gysin enuclea piuttosto laconico la sua pulsione artistica. In questo contesto, nel suo ruolo di compositore egli non si pone necessariamente al centro dell’attenzione, ma spesso funge «solo» da guida concettuale. Per promuovere lo scambio di idee, ha fondato a Basilea lo studio-klangraum (Spazio del suono) e il festival ZeitRäume (Spazi nel tempo).
«Isolare uno dei miei brani dallo spazio sarebbe come realizzare una partitura per pianoforte di un’opera orchestrale: si riconoscerebbero le note, ma non si sentirebbe l’orchestra.»
Gysin scopre spazi sempre nuovi di cui è possibile tracciare una mappa sonora – che siano chiese, con le loro particolarità acustiche, o centrali idriche dismesse in cui l’eco si protrae fino a 30 secondi o, ancora, miniere abbandonate dove regna un silenzio quasi perfetto. E laddove non sia disponibile lo spazio naturale per proseguire l’esplorazione, esso viene concepito con soluzioni architettoniche nuove. La «Leichtbautenreihe» in sei parti costituisce una delle opere centrali nella creazione di Gysin, e non soltanto per le energie profuse nella sua realizzazione – essa rappresenta anche il passo logico successivo, ovvero creare spazi che possano essere trasportati. Si tratta di sei concetti spaziali astratti, realizzati come architetture a padiglione, in cui la singolarità delle situazioni sonore permette una nuova percezione della musica. «Chronos» (Tempo) consiste in un palcoscenico girevole simile a una giostra; in «Gitter» (Gabbia) i musicisti sono disposti «sfericamente» intorno al pubblico; in «Haus» (Casa) è possibile passeggiare nello spazio sonoro di vere e proprie abitazioni; e in «Rohre» (Tubi), di prossima realizzazione (anteprima a settembre 2019, presso il cortile interno del Museo d’arte di Basilea, nell’ambito del festival ZeitRäume), il pubblico e i musicisti si incontreranno all’interno di enormi tubazioni.
«Nelle ultime due parti, a partire dal 2023» confida Gysin «vorrei esplorare la questione degli allestimenti mobili e della loro influenza sull’ascolto. In uno dei progetti, musicisti e pubblico sono seduti su carrelli in continuo movimento. Tutto scorre incessantemente e lo spazio viene sempre ridefinito ex novo. L’ultima parte si concretizzerà in uno spazio sospeso che, come un palloncino, implode e si rigonfia di continuo». Progetti così ambiziosi non sono facilmente finanziabili per un artista. «È necessario un sostegno fin dal concepimento e i costi sono notevoli», dichiara Gysin, che aggiunge immediatamente: «Il contributo Get Going! della FONDATION SUISA è la risposta a questa sfida. Si tratta di una sorta di finanziamento per avamprogetti… e finora non è mai esistito nulla del genere».
Di questi tempi, caratterizzati da un’eventizzazione della cultura, in cui gli esperti di marketing prestano maggiore attenzione alla forma piuttosto che alla sostanza, la «Leichtbautenreihe» simboleggia anche una sorta di contromovimento artistico. «Il vantaggio è che io, nel mio ruolo di artista, concepisco l’evento nel suo complesso», rivela Gysin e aggiunge: «Al giorno d’oggi, in un mondo dominato da un sovraccarico sensoriale, è il musicista stesso a doversi impegnare per trovare la giusta collocazione per la sua musica, poiché questa non può più essere compresa al di fuori del suo contesto».
Nel 2018 la FONDATION SUISA ha iniziato ad assegnare nuovi contributi alla creazione. Con il progetto «Get Going!» vengono incentivati finanziariamente processi creativi e artistici che esorbitano dalle categorie convenzionali. In una serie di ritratti presentiamo i beneficiari dei contributi «Get Going!».
Articles en relation |
«Get Going!» lance sa deuxième édition: «Nous sommes complètement dans l’air du temps» – Sous le titre «Get Going!», la FONDATION SUISA a attribué l’année dernière pour la première fois quatre contributions afin de promouvoir des processus créatifs innovants qui se situent hors des catégories usuelles. Les réactions positives ont été impressionnantes. Un deuxième appel à candidatures sera mis au concours à fin juin 2019. Continuer |
Profession et vocation – Comment fonder et administrer un ensemble de musique contemporaine? Où puis-je obtenir un soutien financier pour mes projets musicaux? Quelle est l’utilité de SUISA et de Swissperform? Comment puis-je faire connaître mes œuvres via Internet? Quelques impressions de la première édition de la «Journée d’orientation professionnelle» au Festival Archipel 2017. Continuer |
Arpenteur et explorateurd’espaces sonores – Le saxophoniste Bertrand Denzler, qui se meut à l’intersection de l’improvisation et de la composition, recherche constamment de nouvelles possibilités d’expression. Ce Genevois de 55 ans établi à Paris entend à présent repousser les frontières de son dialogue avec d’autres artistes dans le cadre d’une «résidence en mouvement». La FONDATION SUISA soutient financièrement ce projet par une contribution «Get Going!». Continuer |