37% de musique suisse à la radio, 32,5 millions de francs pour les productions cinématographiques suisses, 55,1 millions de francs de redevances de droits d’auteur et plus de 300 festivals soutenus: ces chiffres montrent de manière impressionnante l’importance que revêtent les chaînes de la SSR pour la création culturelle suisse (Source: https://publicvalue.srgssr.ch/fr/a-propos-de-la-valeur-publique/chiffres-donnees-faits/).
Avec son offre diversifiée de radio, de télévision et de plateformes en ligne dans les quatre langues nationales, la SSR touche chaque jour plus de trois millions de personnes. Pour les artistes en particulier, cette énorme portée offre une scène importante pour présenter leurs créations à un large public. Rien que dans le domaine de la musique, les chaînes de la SSR diffusent chaque année plus de 800 heures de musique – de la pop au rock, en passant par l’urban, le jazz et les concerts classiques. Plus de 500 émissions musicales et plus de 1200 reportages à dominante musicale soulignent l’engagement continu bien au-delà du simple spectre du divertissement.
Cet engagement de la SSR en faveur des créatrices et créateurs culturels/les suisses est actuellement fortement menacé en raison de diverses interventions politiques.
12 millions de francs de redevances de droits d’auteur seraient perdus
L’initiative populaire «SSR: 200 francs ça suffit!» demande que la redevance des ménages pour la télévision et la radio soit abaissée de 335 francs actuellement à 200 francs. De plus, toutes les entreprises devraient être exemptées de la redevance. Pour la SSR, cela signifierait que ses recettes passeraient d’environ 1,2 milliard de francs actuellement à 650 millions de francs à l’avenir. Une acceptation de l’initiative conduirait donc inévitablement à un appauvrissement de l’offre de la SSR, notamment dans le domaine culturel. De nombreux artistes verraient non seulement leur public se réduire, mais ils recevraient également moins d’argent provenant des droits d’auteur. Rien que pour SUISA – et donc pour les auteurs et les éditeurs de musique – nous prévoyons une baisse des redevances de droits d’auteur de 12 millions de francs par an si l’initiative était acceptée. Cela correspond à environ 8% des recettes de SUISA provenant des droits d’auteur en Suisse.
Le peuple devrait se prononcer sur l’initiative en 2026. Cela signifie que huit ans après avoir rejeté l’initiative «No Billag» en 2018 à une large majorité de 71,6%, il devra à nouveau se prononcer sur l’avenir de la SSR et donc du service public médiatique.
Le Conseil fédéral veut lui aussi baisser les redevances radio et TV
En juin 2024, le Conseil fédéral s’était clairement prononcé contre l’initiative populaire et l’avait rejetée. Le Conseil fédéral a estimé qu’elle allait trop loin. Cette profession de foi en faveur de la SSR et du service public est certes réjouissante. Mais en même temps, il a ordonné une baisse progressive de la redevance des ménages de 335 à 300 francs d’ici 2029. En outre, le Conseil fédéral veut exonérer de la redevance radio et TV encore plus d’entreprises qu’elles ne le sont déjà aujourd’hui, ce qui signifie qu’à partir de 2027, environ 80% des entreprises assujetties à la TVA ne devront plus payer de redevance radio et TV.
Ce règlement peut certes être un meilleur mal que l’initiative de réduction de moitié. Mais cette baisse de la redevance touchera aussi durement la SSR et son offre, puisqu’elle recevra environ 120 millions de francs de moins qu’aujourd’hui au titre de la redevance des ménages. Conjuguée à la baisse continue des recettes publicitaires, cette mesure obligera la SSR à réduire à la fois son offre et son personnel. Les musiciens ressentiraient aussi directement la baisse des redevances imposée par le Conseil fédéral: SUISA s’attend ici à une diminution des recettes d’environ 3 millions de francs pour les auteurs/trices et les éditeurs/trices de musique.
Indépendamment de la variante qui se réalisera: Dans les années à venir, la SSR devra s’accommoder de recettes plus faibles. Des économies et les réductions qui en découlent sont donc inévitables.
La SSR a déjà dû mettre en œuvre les premières mesures
La SSR a d’ores et déjà commencé ce démantèlement. Ces derniers mois, elle a annoncé qu’elle réduisait son offre dans le domaine culturel, par exemple en supprimant des émissions comme «Gesichter & Geschichten», «Vivants» ou «Nuovo». En outre, les reportages sur les films et les séries ont été réduits. Autant de mesures qui ont provoqué une grande incertitude dans le milieu culturel. Et dans différents médias, on spécule déjà sur le nombre de postes que la SSR va supprimer dans un avenir proche.
Mais les dommages vont bien au-delà de la SSR et de la branche culturelle: une réduction de l’offre et du personnel de la SSR sera également ressentie par d’autres entreprises qui, en tant que fournisseurs de la SSR, perdront des commandes et des recettes. On peut donc se demander si les 2.90 francs que chaque ménage économiserait par mois justifient cette réduction.
Résistance du secteur culturel contre le démantèlement
Comme lors de l’initiative «No Billag», les associations et organisations culturelles s’engagent à nouveau contre l’initiative populaire et la baisse des redevances imposée par le Conseil fédéral. SUISA le fait dans le cadre de Swisscopyright, l’association faîtière des cinq sociétés de gestion suisses, dont font partie ProLitteris, SSA, Suissimage et Swissperform. En collaboration avec Suisseculture et d’autres organisations culturelles, Swisscopyright s’est prononcée contre l’initiative populaire et la proposition du Conseil fédéral. En outre, les sociétés de gestion s’adressent directement au Parlement avec des recommandations sur les mesures proposées et cherchent le dialogue avec les représentants politiques.
Les principales revendications des sociétés de gestion sont les suivantes :
- Pas d’affaiblissement supplémentaire de la SSR et donc du service public médiatique: la SSR se trouve déjà aujourd’hui dans une situation financière tendue. La redevance des ménages a été successivement réduite ces dernières années, passant de 490 francs par ménage privé à 335 francs aujourd’hui. La baisse des recettes qui en a résulté, associée à celle des recettes de la publicité télévisée, également en recul, a conduit la SSR à enregistrer chaque année des pertes. Ces pertes ne peuvent être couvertes par les réserves de la SSR que jusqu’en 2025 probablement. Dans ce contexte, une nouvelle baisse de la redevance des ménages n’est pas indiquée.
- Les priorités doivent être fixées correctement: outre la baisse de la redevance, le Conseil fédéral a également décidé que la nouvelle concession SSR n’entrerait en vigueur qu’en 2029. Cela signifie que le mandat de prestations de la SSR ne sera défini qu’après que les électeurs se seront prononcés et que la redevance aura déjà été progressivement abaissée. C’est donc d’abord le prix – le montant de la redevance – qui sera discuté et voté, et ensuite seulement le produit proprement dit – le mandat de la SSR. L’électorat ne sait donc pas pour quelle offre il devrait payer moins en cas d’acceptation de l’initiative. Il faut donc d’abord discuter de ce que contient le mandat de prestations de la SSR avant de décider ou de voter sur le montant de la redevance des ménages.
Engagement pour une SSR forte et pour les créateurs culturels
Dans les mois à venir, SUISA continuera à s’engager, avec d’autres organisations, pour une offre culturelle forte sur les chaînes de la SSR et pour combattre l’initiative populaire à venir. Comme lors de la campagne contre l’initiative «No Billag», il faudra à nouveau que des créateurs culturels de premier plan s’engagent en faveur d’un service public médiatique fort et d’une visibilité aussi grande que possible de leurs créations à la radio et à la télévision. Car ce sont toujours les chaînes de la SSR qui offrent la plus grande plateforme aux artistes d’ici et qui soutiennent et encouragent le plus la création culturelle suisse.