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«Le morceau doit ressembler à une danse sauvage»
Le cornettiste et trompettiste vaudois Théo Rossier étudie depuis l’automne dernier la composition avec Xavier Dayer à la Haute école des arts de Berne.
Photo: Laurent Rossier
Texte de Markus Ganz, contributeur invité
Le 27 août 2023, le Festival Murten Classics présentera, à l’occasion du Centenaire de SUISA, quatre œuvres réalisées sur commande par une nouvelle génération de jeunes compositrices et compositeurs suisses. Théo Rossier est l’un d’entre eux.

Le cornettiste et trompettiste vaudois Théo Rossier, né en 2002, compose sans formation jusqu’en 2019. Il commence alors à suivre des cours d’harmonie au Conservatoire de Lausanne dans le cadre de la direction d’ensemble à vents. Dès 2021, son œuvre intitulée «Celui qui chuchotait dans les ténèbres» est retenue par l’Orchestre de Chambre de Lausanne à l’occasion d’un projet visant à promouvoir les compositeurs et compositrices suisses. L’idée de cette œuvre en trois mouvements lui est venue en lisant le livre de H.P. Lovecraft, «The Whisperer in Darkness». «Je ne voulais cependant pas décrire musicalement la nouvelle, mais plutôt ce que le titre évoquait pour moi».

Des liens thématiques

En 2022, Théo Rossier remporte le premier Prix du Concours de composition du Festival européen des Brass Bands avec l’œuvre «Stendhal’s Syndrome». Le titre de cette pièce, dont la première a eu lieu au Townhall de Birmingham, fait référence à une série de troubles psychosomatiques qui peuvent survenir lorsque l’on est submergé par les stimuli des œuvres d’art. Théo Rossier a pensé aux œuvres de M. C. Escher «avec leurs figures impossibles et leurs remplissages de surface qui fascinent et hypnotisent dès qu’on pose notre regard dessus». Après avoir terminé avec succès sa maturité professionnelle commerciale en automne 2022, il étudie la composition avec Xavier Dayer à la Haute école des arts de Berne.

Interrogé sur ses préférences et ses influences, Théo Rossier explique qu’il aime surtout la musique moderne, «en particulier celle de compositeurs comme Olivier Messiaen et Igor Stravinsky». Mais il trouve aussi l’œuvre de Jean-Sébastien Bach «extraordinaire». Il souligne en outre qu’il n’a pas encore écrit beaucoup de pièces et qu’il n’a pas encore développé un style personnel vraiment mature. «Quand les gens écoutent ma musique, ils disent généralement qu’elle leur rappelle tel ou tel compositeur, et il n’y a pas de mal à ça. Mais j’essaie bien évidemment de développer mon propre style».

Conseils de la part du mentor

La commande passée par Murten Classics compte beaucoup pour Théo Rossier, car il s’agit de sa première composition commandée et que la collaboration avec un orchestre représente pour lui une belle occasion. Comme il aime donner une base thématique à ses compositions, le lien avec le thème du Festival «Geschichten – Histoires» lui a paru facile. «En effet, j’aime beaucoup les histoires et je voudrais, avec mon œuvre ‹Satyrus›, établir un lien avec l’Antiquité grecque, une époque formidable». Il trouve également intéressant le style littéraire de la comédie grecque et s’en est inspiré, en particulier de la créature mythologique hybride qu’est le satyre.

Avant de commencer à composer en octobre 2022, Théo Rossier a réfléchi à «l’émotion qu’il souhaitait susciter pendant que l’œuvre se joue». Il a ensuite créé le concept harmonique, y compris les mélodies, et élaboré un plan de la pièce. En mars 2023, il termine une première version de la partition et la transmet à son mentor Daniel Schnyder, qui lui donne alors un premier feedback. «Il m’a fait comprendre qu’une partie était trop compliquée à lire. Il m’a aussi conseillé d’utiliser d’autres instruments à un moment donné. Mais il a aussi constaté que je n’avais pas utilisé l’enharmonie de manière logique ou que le rythme était trop dur dans un passage. Ou il me recommandait d’écouter un certain morceau».

Des instructions non conventionnelles

En avril, Théo Rossier retravaille une première fois la partition en suivant les conseils de Daniel Schnyder. Comme pour la composition, l’ordinateur lui a été d’une grande aide, lui permettant d’essayer différentes possibilités. «Ce n’est cependant pas la solution parfaite, car je ne peux pas entendre l’équilibre entre les instruments comme il le sera lors de l’interprétation par l’orchestre. Mais il est bon d’avoir une première impression, aussi pour pouvoir estimer si une partie semble trop longue».

Lors de la première, les pièces des «Young Composers» seront accompagnées par des œuvres traditionnelles d’Archangelo Corelli et d’Ernest Bloch. Théo Rossier connaît ces deux œuvres, et s’en est «un peu» inspiré. Elles sont en effet «clairement plus traditionnelles que ma pièce». Sa pièce aura l’effet d’une «danse sauvage», en accord avec le personnage du satyre qui donne son titre à la pièce. «J’utilise en outre des instruments inhabituels comme une bouteille de vin», explique-t-il de manière ambiguë.

Concrètement, «le percussionniste utilise le son d’une bouteille, et il ne l’utilise qu’une seule fois (rires) parce que c’est le son d’une bouteille qui éclate». On peut alors se demander comment il note ce détail sur la partition. «Il y a une instruction pour le percussionniste, qui lui indique: ‹casse la bouteille›». Il souhaite également donner aux autres musiciens un espace pour l’interprétation. Mais ce qui importe avant tout à Théo Rossier, c’est une chose: «J’espère que tout le monde aura du plaisir à écouter ma pièce lors du concert».

Chaîne Youtube de Théo Rossier: www.youtube.com/@theorossier166

Concert pour les 100 ans de SUISA lors du Festival Murten Classics 2023

L’année dernière, le Murten Classics a demandé aux quatre jeunes talents suisses Pascal Bachmann (*2006), Joëlle Nager (*2000), Théo Rossier (*2002) et Arseniy Shkaptsov (*1993) de créer chacun une composition de huit minutes maximum pour un orchestre à cordes, un piano, une harpe et deux percussions sur le thème du Festival «Geschichten – Histoires». Ces quatre «Young Composers» ont été sélectionnés par le chef d’orchestre Christoph-Mathias Mueller, également directeur artistique de Murten Classics, et par le «Senior Composer» Daniel Schnyder. Ce dernier endosse par ailleurs le rôle de mentor et accompagne les «Young Composers» dans leur processus de composition. Né en 1961 à Zurich et installé à New York depuis 1992, ce saxophoniste et flûtiste est considéré comme l’un des compositeurs les plus polyvalents de sa génération.

Samedi 26 août à 14h00, une répétition générale publique avec des échanges aura lieu à l’Eglise allemande de Morat avec pour titre «Aus der Werkstatt geplaudert» (bavardages dans l’atelier). Les billets pour le concert du dimanche 27 août comprennent également l’accès à cette répétition publique en présence de la compositrice et des compositeurs. Le concert, qui présentera ces œuvres pour la première fois, débutera le dimanche à 20h00 dans la Cour idyllique du château. Les œuvres des Young Composers seront accompagnées du «Concerto grosso op. 6, n° 4» d’Arcangelo Corelli et du «Concerto grosso n° 1» d’Ernest Bloch. Le programme sera interprété par le Hilaris Chamber Orchestra, rejoint par Isabel Goller (harpe), Kiril Zvegintsov (piano), Jens Ruland (percussions) et João Carlos Pacheco (percussions) et dirigé par le Chef d’orchestre Christoph-Mathias Mueller.

Billets en vente à partir du 1er juin et plus d’informations sur: www.murtenclassics.ch

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